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Jean-Michel Basquiat est « le » peintre dont la cote monte actuellement vers l’infini, rejoignant rapidement celle des plus grands maîtres de tous les temps. Actuellement exposées à la Fondation Vuitton, à Paris, ses oeuvres néo-expressionnistes illustrent à la fois sa courte vie chaotique et la flamboyance artistique des années 80 à New York.

 

 

Né à Brooklyn en 1960 d’un père haïtien et d’une mère aux origines portoricaines, Basquiat a montré dès son plus jeune âge une grande aptitude à dessiner. N’importe où, n’importe quoi, avant que sa mère ne lui offre un livre illustré de l’anatomie humaine, qui l’a passionné. sans avoir la moindre opportunité de suivre des cours de dessin ni de peinture. Il passait son temps à croquer tout ce qu’il voyait, sur un mur, un bout de carton, un papier, et, quand il a pris ses ailes et claqué la porte du domicile familial, sur des cartes postales qu’il essayait de vendre un dollar pour survivre, tout en s’essayant aussi à la musique avec des copains, formant avec eux, un groupe, Gray, fortement inspiré par le style de John Cage, avec une rythmique mi jazzy, mi synth-pop et par le talent de Miles Davis, de Dizzy Gillespie et Charlie Parker. Sans oublier la musique Zydéco, typique alors de la Louisiane, aux accents africains.Et Basquiat les a tous aussi célébrés dans des tableaux…

 

Basquiat: le groupe Gray 

 

Au coeur de ce New-York artistique en pleine effervescence où il est facilement accepté par de tous, il fait une rencontre qui s’avère essentielle pour lui, celle du graffeur Al Diaz. Et ils forment sous le nom de Samo. Mais Basquiat définit aussi rapidement sa propre peinture, dont un échantillon sidère en 1980 Andy Warhol qui décide de le prendre sous son aile, de l’inclure dans sa bande de la Factory, de lui proposer un appartement-atelier. Il lui présente aussi des artistes à l’odeur de scandale comme un autre graffeur, Keith Haring, avec qui il travaillera, ou un photographe sulfureux, Robert Mapplehorpe. L’admiration d’Andy Warhol est telle pour Basquiat qu’il peint avec lui une centaine de toiles, au point qu’ils feront nombre d’expositions ensemble, jusqu’au jour où la critique considérera avec fracas que Warhol profite honteusement du talent de son jeune protégé, qui est en fait largement devenu son maître.

 

Andy Warhol et Jean-Michel Basquiat 

En quelques mois, Basquiat est devenue une star, un « people », un statut qui le grise, comme son goût pour l’alcool et la drogue. Il s’affiche avec Madonna qui partage un moment sa vie mais il ne cesse jamais de peindre, encore et encore,  incluant dans ses tableaux des portraits, des dessins, des phrases, des collages, affichant aussi son admiration sans borne pour des boxeurs stars comme Cassius Clay et Sugar Ray Robinson, symboles pour lui, dans une Amérique encore raciste, de l’intégration rêvée des noirs luttant à poings égaux avec des blancs.

 

 

Quand son ami et parrain Andy Warhol meurt, en 1987, trois ans après leur rencontre, Basquiat  qui n’a encore que 27 ans, s’enfonce dans la détresse et les produits dopants. Seul, son travail, à la renommée époustouflante, le maintient encore debout, alors même que l’idée de la mort, avec cette montée du Sida qui ravage ses amis, le hante, le dévaste et lui inspire certains tableaux déprimants, loin de son habituelle explosion de couleurs.

 

Basquiat: « Riding with death ». 1988.  D’après un dessin de Léonard de Vinci 

 

Trop tôt disparu, Basquiat laisse une oeuvre conséquente, émouvante et exaltante, avec 800 tableaux et 1500 dessins, qui s’arrachent aujourd’hui à prix d’or et dont le public s’enchante, notamment à travers cette exposition à la Fondation Louis Vuitton,  150 de ses oeuvres, dont certaines inédites, nous font suivre le chemin de sa vie.

 

 

Grégoire Colard

 

Fondation Louis Vuitton: 8 rue du Mahatma Gandhi, Paris 75016, de 11h à 19 heures. 

Bus navette : avenue de Friedland, sortie 2 Métro Etoile. 2 euros à régler uniquement par carte bancaire.

( Il est prudent de réserver son billet pour l’exposition via Internet ).

Renseignements: 01 40 69 96 00

 

 

Le street art, né dans la sauvagerie et l’illégalité dans les années 60, a aujourd’hui pignon sur rue, et la commune du Grand Paris organise désormais des parcours en bateau pour vous le faire admirer. 

Tout le monde est désormais habitué à découvrir un beau matin un dessin, une fresque sur le mur d’un immeuble voisin, sur une porte, sur le sol, bref, n’importe où. Autrefois, les « taggers » devaient se cacher et travailler de nuit pour échapper à la vindicte policière et éviter des amendes trébuchantes !  Considérés comme des voyous défrayant alertement notre environnement, ces artistes « vandals » de la pénombre n’en menaient pas large, d’autant plus que leurs grafittis étaient comme des cris de rage contre la société.  Certains d’entre eux sont pourtant devenus des stars, dont chacun connaît le style, que ce soit entre autres Keith Haring à New York avec ses fameux petits bonshommes réalisés au  pochoir qui envahissaient les murs du métro et de la ville, ou le français Speedy Graphito.

 

De Keith Haring/1989 

Le Street Art est devenu une profession officielle,  sans revendication particulière, que ce soit en France ou dans le monde, largement autorisée par nos édiles municipaux et même acceptée par les plus grands musées. C’est ainsi que la commune du Grand Paris organise chaque été depuis 2016 une sorte de croisière de 2h30, « Le Street Art Avenue Grand Paris » sur le canal Saint Denis qui relie le Stade de France  au parc de la Villette, où chacun peut participer à la découverte d’oeuvres éphémères créées sur des façades, des piliers d’autoroute, des murs, et même sur l’ensemble d’une cimenterie ( redécorée par Guate Mao). 20 artistes ont été ainsi invités à laisser libre cours à leur imagination, comme Telmo Niel, Polar, Alancha Arango, Zest, Swen, Tarek Benaoum, Banksy et Marko 93. Des noms de plus en plus reconnus.

 

Les félins/ fresque du pochoiriste Marko 93

 

25 fresques sont ainsi proposées cette année sur le trajet de l’urban boat qui lève l’ancre chaque jour pendant l’été, jusqu’au 18 août, au bassin de la Maltournée, à Saint Denis, devant le  « 6 B« , atelier de création pour artistes résidents. Un conférencier, JP Mano, spécialiste des cultures urbaines et hip hop, éclaire les croisiéristes  sur la diversité discursive des créateurs , sur leurs instruments de travail, qui au pochoir, certes, mais aussi en bombe aérosol, en peinture acrylique, en collage, avec des affiches, etc…Le tout sur un fond musical plutôt…entraînant, du hip hop, danse de la rue,   considéré comme très lié au street art, de par son inspiration citadine.

 

 

 

En cette période de canicule, n’hésitez pas à embarquer pour cette visite artistique de Paris et à donner votre avis sur l’embellissement ( ou non! ) de notre environnement. N’oubliez pas que l’art est un partage!

 

Grégoire Colard 

 

Jusqu’au 18 août. Embarquement au bassin de la Maltournée, à Saint Denis (RER D ou  tramway)

Prix: 12 euros.

 

Nichée au coeur de la Butte Montmartre, la Villa Cadet est devenue jusqu’au 29 juillet la « Villa Extraordinaire », offrant ses dix pièces et son jardin-forêt d’un hectare, tout autant extraordinaire, au talent d’artistes contemporains et à la promenade émerveillée de tous.  

 

 

Qui sait que Montmartre, cette ancienne colline pauvre rattachée à Paris en 1860, autrefois lieu d’inspiration de tant de peintres, tels ToulouseLautrec, Suzanne Valadon, Géricault, Corot, Renoir, Degas, Pissaro, Van Gogh, etc…, et aujourd’hui devenu l’un des quartiers le plus recherché et le plus cher de la capitale, recèle précieusement nombre de jardins que des promoteurs immobiliers seraient avides de défricher pour y élever des immeubles de luxe ? Il y existe pourtant rue de l’Abreuvoir, place Dalida, une propriété, la Villa Cadet, qui, pour la première fois cette année, dévoile au public son hectare de forêt dont la canopée aveugle les yeux du voisinage ! Tout cela le temps d’une exposition artistique éphémère organisée par la Cité Internationale des Arts, qui a déjà une assise dans le Marais.

 

 

L’idée de cet évènement est d’inviter des artistes résidents, issus du monde entier, à installer leurs oeuvres soit dans la villa de trois étages, soit dans la verdure extérieure, suivant un patchwork d’inspirations totalement différentes les unes des autres. Du Street Art, des arts plastiques, une chambre de lumières conçue par Eric Michel, des assemblages métalliques, un tracteur tagué, une montgolfière, une jungle de salon ( photo d’ouverture ci-dessus) ) créée par le groupe musical Polo@Pan (produit par Raphaël  Hamburger) et un espace musical dans lequel les chaises ont grimpé aux murs et où des groupes viennent performer le soir. On trouve aussi dans cet espace contemporain nombre d’objets  du quotidien recyclés pour notre regard par le site Leboncoin !

 

 

A l’air libre, des chemins de terre, recelant çà et là des oeuvres diverses, percent la densité des arbres, découvrant des terrasses et des bars éphémères où sont servis de jus de gingembre et autres, des tartes à la cannelle, et où il fait bon s’effondrer dans des hamacs ou se prélasser sur des lits de piscines à baldaquins… Là, l’expression, « prendre du bon temps », est tout à fait appropriée. Pas un bruit, du soleil si on veut, de l’ombre si on préfère, le tout est est un havre de paix dans ce Montmartre envahi de touristes, dans ce Paris toujours pressé.

 

 

Si l’entrée est gratuite, le temps ici prend une valeur inestimable grâce à sa beauté intemporelle et à sa  richesse culturelle. Et à sa petite forêt…

 

 

Grégoire Colard 

 

La Villa Extraordinaire, 15 rue de l’Abreuvoir, Place Dalida, Paris 18eme .Jusqu’au 29 juillet.

Exposition: mardi et mercredi :11 à 22 heures/ jeudi à dimanche: jusqu’à minuit.

Accès jardin: de mardi au vendredi: 11h à 22 h / samedi et dimanche: jusqu’à 23 heures.

 

 

Achbé est son nom d’artiste street art. Sa phrase du jour, écrite à la craie chaque matin sur le trottoir en pente d’une rue étroite de Montmartre, exulte un chant d’amour et d’humanisme soutenu par une rage contenue. Une oeuvre picturale? Une pensée philosophique?  Une phrase pamphlet? Un gag éphémère? Une nouvelle forme d’art, en tous cas.

 

 

En juin 2016, son mari est mort foudroyé, sur le trottoir, devant leur maison. Comme tombé du ciel. Alors, Achbé, a pris les initiales de son nom pour en faire son propre patronyme d’artiste, et, un matin, lui a écrit un mot, comme ça, à la craie, sur le goudron.  Et un autre le lendemain, et les autres jours. 315 en tout. C’était pour elle une forme de résilience, mais c’est devenu au fil du temps non seulement comme un dialogue avec son compagnon disparu, mais un échange avec les piétons, les touristes, les voisins, les commerçants du coin,  tous ceux qui passent par là, sans oublier maintenant les photographes et les journalistes qui viennent fouler  son chemin pavé d’amour.

Ce qui intéresse Achbé, c’est de partager comme un acte spontané son impression du jour, son indignation, sa révolte, mais aussi  ce qui la fait sourire « : « Je n’écris jamais rien de personnel, je ne ressens pas le besoin de raconter mon histoire. C’est comme un journal intime, sauf qu’il n’est pas intime et que je le partage avec qui veut.  Je « craie » sur l’actualité, la mort de Johnny, ou celle de France Gall, mais aussi sur les migrants, l’injustice sociale, la condition des femmes, la bêtise humaine, les SDF, ou sur Arthur Rimbaud, Simone Veil, même Macron !   J’adore faire des jeux de mots, des associations d’idées , en français et en anglais. J’imagine des conseils rigolos. Et cela m’amuse de « craier »sur le sol avec l’écriture appliquée d’un enfant. » 

Chaque jour, Achbé prend une photo de sa nouvelle « craiation »,  la poste sur les réseaux sociaux où elle est suivie avec un certain fanatisme dans 56 pays, et est actuellement exposée jusqu’au 23 février par la Galerie Central Dupon, au bas Montmartre. Une nouvelle grande dame de l’art graphique.

 

Grégoire Colard 

Galerie Central Dupon 74 rue Joseph de Maistre Paris ( XVIIIe)