Autrefois usine à deuil, le 104 est devenu un lieu de vie artistique incontournable au nord de Paris…
Quand on pénètre au 104, situé au 5 rue Curial, dans le 19éme arrondissement de Paris, la désorientation s’empare de votre esprit. Est-ce là une ancienne gare, de vieux entrepôts ou abattoirs ? Alors on visite ces grands bâtiments en pierre de taille, comprenant en leurs seins des halles aux immenses plafonds élevés, des cours intérieures où le soleil s’alanguit, des coursives étroites où vous poursuivez un labyrinthe énigmatique et de larges plates formes où s’entraînent à leur gré des musiciens, des mimes, des acrobates, des danseurs de hip hop ou de salsa.
Tout est là, à votre disposition, si vous voulez vous prélasser sur une chaise longue, boire un verre, déjeuner, rêvasser, lire un livre que vous empruntez en l’échangeant contre l’un des vôtres, ou vous poser au coeur d’un groupe d’artistes. L’espace est pour eux, pour vous, pour tout le monde. Un air de liberté est là, qui vous apaise et vous inspire.
L’une des halles
Autrefois, ce lieu qui s’étend sur 220 m de long et 75 de large était depuis 1874 le siège du Service Municipal des Pompes Funèbres de Paris, connu comme une usine à deuil, avec ses convois, ses cercueils, ses chevaux harnachés de plumes noires, ses écussons, ses linceuls, ses cochers à hauts de forme. Depuis 2014, sous la houlette de la Ville de Paris, deux hommes, Robert Cantarella et Frédéric Isbach, ont fait de ce lieu funèbre un espace dédié à l’inspiration, à la performance, à la recherche artistique, quelle que soit sa forme.
Frank Herfort : soldats russes et rêve hawaïen.
C’est ainsi que depuis quelques années s’y tient régulièrement, au milieu de toute cette agitation créatrice, « Circulations« , un festival de la jeune photographie européenne. La petite circulation, sans ticket d’entrée, vous permet d’évoluer dans les grands espaces afin d’estimer le travail de ces jeunes artistes, et la grande circulation , avec ticket d’entrée, de pénétrer dans les bâtiments où des centaines d’autres oeuvres sont accrochées.
Certaines sont simplement belles, d’autres étonnantes, voire déconcertantes et décalées, recherchées, élaborées. Les sujets sont extrêmement divers, qu’ils soient politiques, sociaux, floraux, religieux, sexuels ou simplement esthétiques. Chacun des photographes exposés a droit à son propre regard sur le monde, sur son pays, sur sa vie, qu’il soit personnel, familial, esthète, collégial ou citoyen.
Crestani Arthur
À chaque visiteur d’arpenter à sa guise, et de prendre son temps, de s’arrêter, son bonheur étant alors de se figer devant telle ou telle photo, de noter le nom de son capteur d’image. Et peut-être d’imaginer de saisir lui-même des clichés différents, improbables.
Frank Herfort
Grégoire Colard
Au Centquatre jusqu’au 6 mai. Exposition » Circulations »
Le 104, 5 rue Curial, Paris 19éme.